Marcel JOYEUX

 

 

J’ai un ami écrivain, habitant un petit village de Normandie qui domine la plage d’Utah Beach. Appréciant une estime réciproque envers Serge Ravanel, tous deux avait envisagé d’écrire à quatre mains les Mémoires de cet illustre Résistant. Une concordance difficile d’emploi du temps des deux hommes empêcha la réalisation du projet avant le décès de Serge Asher.

 

 

Toujours au fait des réalités des démarches du Groupe de Recherches des Fusillés du Bois de la Reulle, Gilles Perrault exulta le jour où je lui appris après l’identification de Charley de Hepcée, celle de Marcel Joyeux. Au point de prononcer ces mots gravés dans mes souvenirs : « Marcel Joyeux ?! On ne peut pas oublier un nom pareil. Ceci d’autant plus, me concernant, que chaque fois que je rencontrais Ravanel, ce dernier me disait : « Il est un homme dont j’aurai aimé savoir ce qu’il est devenu….Cet homme s’appelait Marcel Joyeux. »

 

 

Capitaine de l’Armée de l’Air, dessinateur d’études pour la Marine et l’Aviation, moniteur de vol à voile, Marcel Joyeux s’engagea dans la Résistance à partir de septembre 1942.

 

Personnage méconnu de la Résistance toulousaine, sous les pseudonymes de « Joy » et « Joly », il était le chef de la région R4 (Midi-Pyrénées sauf l’Aveyron mais avec le Lot et Garonne et les Basses Pyrénées, aujourd’hui Pyrénées Atlantiques) des Groupes Francs de Combat.

 

 

Intrépide et courageux, il recrutait et formait des militants dans les usines d’aviation et dans le milieu étudiant. Ses équipes constituées prélevaient des armes sur les stocks militaires camouflés, les remettaient en état et les cachaient de nouveau pour constituer des stocks et les utiliser à la demande.

 

 

Organisant des évasions et multipliant les coups de mains, jamais, il n’enverra ses hommes dans l’action sans en prendre lui-même le commandement. Homme d’action, payant de sa personne, il fit bien des misères à la SIPO-SD (Gestapo) et à la Milice. Conduisant les camions, il réceptionnait les matériels et armes parachutés pour les conduire en lieux sûrs, posait des bombes, notamment au siège du RNP, le Rassemblement National Populaire, et aux domiciles des collaborateurs dont il organisait les filatures.

 

En juin 1943, il assura l’évasion spectaculaire de quatre prisonniers de la prison d’Agen en Lot-et-Garonne en un temps record vêtu, comme ses compagnons, de l’uniforme de gendarme. Avec des membres du Groupe Morhange auquel il appartenait il enleva trois adhérents du Parti Populaire Français afin d’obtenir des informations et participa à des opérations radicales envers des résistants retournés et informateurs des forces d’occupation. Il organisa le noyautage des services de la police ainsi que ceux de la Préfecture de la Haute-Garonne, prenant un malin plaisir, à s’emparer pour la Résistance d’automobiles de la commission d’armistice.

 

 

Adjoint de Serge Ravanel, le chef national des Groupes Francs des Mouvements Unis de la Résistance dont les Toulousains connaissent, notamment, l’engagement lors de la Libération de la ville rose et de la Haute-Garonne lancée par la grève déclenchée le 19 aout 1944 par le Groupe Insurrectionnel Matabiau appuyé par les maquis du Lot en particulier, Marcel Joyeux ne connaitra pas ce moment, lui le Parisien de souche, pour lequel il s’était foncièrement engagé dans les régions de Limoges et de Toulouse.

 

 

Identifié en 2013 par le Groupe de Recherches des Fusillés du Bois de la Reulle Gragnague/Castelmaurou dont l’action tend à faire connaitre les seize martyrs amenés par la Gestapo toulousaine et un détachement du II° Bataillon SS de la division Das Reich, sa vie lui fut retirée par les armes dans la clairière du Bois de la Reulle de Gragnague le 27 juin 1944.

 

 

Il était marié à Marguerite, Résistante elle aussi, militante de Combat, agent de liaison entre Toulouse, Limoges et Lyon.

 

Leur fils, Jean Pierre, résidant à Saint Benoit, près de Jaunay-Clan et de Poitiers, à quelques pas du célèbre Futuroscope, n’a de cesse de retrouver, depuis cette date à jamais gravée dans son coeur, le Bois de la Reulle, la commune de Gragnague, celle de Castelmaurou, leurs environs.

 

 

Après une approche difficile, et qui donc aurait pu vivre autrement une situation rythmée depuis son plus jeune âge par la certitude que son papa avait disparu quelque part outre-Rhin dans un camp de concentration sans nom, il donna toutes ses forces dans une démarche collective dont le résultat couronné d’un succès difficile à appréhender, le conduira, non seulement devant la terre que les Martyrs creusèrent avant leur assassinat nazi mais également, et surtout, devant la sépulture où reposait Marcel depuis 1990, puisque dans un premier temps, lors de l’exhumation des corps, ceux des cinq inconnus, dès septembre 1944, furent confiés au cimetière toulousain de La Fourguette.

 

Depuis novembre 2013, ses restes reposent auprès de Marguerite qui n’a jamais ni douté ni cessé de l’attendre.

 

 

 

                                                                                                                           Georges MURATET

 

                                                                                 GROUPE DE RECHERCHES DES FUSILLES DU BOIS DE LA REULLE 

 

                                                                                  

 

                                  

 

                                                                                                                                                                                 Gragnague/Castelmaurou